dimanche 3 janvier 2010

L'effet de levier sans stress


Nous connaissons des investisseurs - l'un d'entre eux se reconnaitra ;-) - qui nous affirment connaître des gens qui se sont enrichis avec l'immobilier mais aucun qui ne soient enrichis grâce aux actions.

Ces individus sont "aveuglés" par des facteurs propres à l'immobilier, un secteur qui a connu des facteurs très favorables durant les dernières années :

- l'illiquidité du bien qui a protégé l'investisseur des coûts liés aux achats / ventes répétés ainsi qu'à la fluctuation des prix sur courtes périodes.

- la hausse des biens immobiliers durant les 50 dernières années avec une hausse déraisonnable ces 10 dernières années (mais comme nous le voyons depuis 2008, cette hausse n'est pas éternelle).

- une imposition favorable : réduction d'impôts, non imposition sur plus-values immobilières, ...

- un effet de levier important.

Nous allons nous pencher davantage sur cet effet de levier. En effet, tout acquéreur d'un bien immobilier bénéficie en général d'un privilège qui sublime tout rendement : le prêt bancaire.

Démonstration avec un exemple :

Imaginons un ménage lambda qui achète une maison d'une valeur de 200 000 EUR. Pour acheter ce bien, elle fait un apport en cash de 20 000 EUR.

==> son effet de levier est donc de 200 000 / 20 000 = 10 !

Ce qui signifie que si son bien immobilier prend 2% de valeur par an, ce ménage voit son patrimoine croitre de 2% x 10 = 20 % par an !


Attention, car l'effet de levier peut se transformer en "effet massue". Si ce bien perd 2% de valeur tous les ans, le ménage voit au contraire son patrimoine immobilier baisser de -2% x 10 = -20% par an !

Si le ménage a acquis ce bien pour le louer et que le loyer est logiquement indexé à la valeur du bien, il est fortement probable que les revenus issus du bien baissent alors que dans le même temps le coût du crédit reste identique, voire pire, il peut augmenter !

Par cet exemple simple, nous voulons schématiquement vous montrer que l'effet de levier, dans le cadre d'un investissement immobilier, permet de sublimer un rendement uniquement quand les conditions suivantes sont respectées :

- hausse de la valeur du bien

- système bancaire qui accorde des prêts facilement

- des taux accommodants : de préférence le plus faible possible et stables dans le temps (= taux fixe de préférence)

- une capacité du ménage à rembourser ses échéances bancaires jusqu'à la fin du crédit.

Enfin, il ne faut pas oublier que plus cet effet de levier est élevé, plus le ménage est relativement endetté. Ce qui signifie que tout "accro" dans le schéma initial peut être fatal pour le patrimoine du couple : incident divers sur le bien non pris en charge par l'assurance, une baisse des revenus qui ne permet plus d'assurer la charge du crédit, une baisse de l'immobilier...

Autant d'événements qui peuvent être lourds en conséquence et que tout investisseur dans la pierre ne doit ignorer. Le gain peut être effectivement important, mais de nombreux risques sont présents.


A Valeur et Profit, nous apprécions un autre effet de levier qui permet d'acquérir des actifs moins chers que leur valeur "économique" et sans endettement : l'effet de levier comptable ou effet de levier technique.

Certes, cet effet de levier permet rarement d'atteindre des effets multiplicateurs de 10 ou plus, mais il offre l'avantage de donner à son utilisateur une marge de sécurité élevée. A nos yeux le rapport rendement / risque est plus favorable à l'effet de levier technique qu'à l'effet de levier lié à l'achat d'un bien immobilier du fait d'un endettement nul.

En effet, dans notre approche, plus l'effet de levier est élevé, plus le risque sera faible. Tout le contraire de ce que nous avons vu pour l'immobilier.


Appliquons cet effet de levier technique avec un exemple d'un investisseur dans la valeur

Il a repéré un titre dont la valeur des actifs tangibles nets de toutes dettes (financières, fournisseurs, fiscalité, ...) est de 10 M EUR. Hors cette société est cotée en bourse et valorisée pour 5 M EUR. Cerise sur le gâteau, cette entreprise fait des bénéfices. Ce qui confirme une certaine valeur des actifs : la valeur comptable et la valeur économique semblent concorder.

Si l'investisseur acquière ce titre qui valorise l'entreprise pour 5 M EUR, l'effet de levier technique sera de :

10 M EUR (valeur des actifs nette de dettes ) / 5 M EUR (capitalisation boursière du titre) = 2

Vous comprenez bien que si dans un excès de pessimisme des vendeurs amènent la capitalisation boursière de cette entreprise à 2 M EUR et que la valeur des actifs nette soit maintenue, non seulement l'acheteur démultiplie son effet de levier (il passe de 2 à 5 !) mais diminue également de façon exponentiel son risque.


Quelles conditions permettent de bénéficier d'un bon effet de levier technique ?

- tout type de marché (bull ou bear)
- des actifs qui ont une valeur stable dans le temps : cash, créances, immobiliers (résidentiel > immobilier entreprise > entrepôts > immobilier industriel > terrains).

Le plus grand avantage de l'effet de levier technique est qu'il ne nécessite aucun endettement et qu'appliqué à un titre d'une entreprise qui fait des profits, vous multiplier vos chances d'augmenter votre rendement.


Nous verrons dans un prochain article les deux autres effets de levier à la porté de l'investisseur : l'achat de titres à crédit et le private equity.

10 commentaires:

Unknown a dit…

voila un bon sens comme je les aime, appuyé par des chiffres sans contestation possible

merci de ce petit billet ...

Dominique

Michael de Valeur & Conviction a dit…

Très intéressante ta notion de levier technique.

Valeur et Profit a dit…

Merci Dominique et Michael pour vos encouragements.

Ce n'est pas facile d'écrire des billets "originaux".

Est-ce que vous utilisez (ou avez déjà utilisé) un effet de levier au cours de votre vie d'investisseur que ce soit immobilier ou action ? Si oui, lequel ? Pourquoi et qu'en retenez-vous ?

CDLT,
Franck

Michael de Valeur & Conviction a dit…

Oui un petit levier pour l'immobilier. Mais le but était de ne pas vendre ma partie action.
Pour la partie levier technique, je l'utilise pour mes actions en directs. En général, je demande une marge de 50% sur la VANE.

Anonyme a dit…

En effet, Franck, je me reconnais: j'ai considérablement augmenté mon patrimoine grâce à l'effet de levier de l'endettement. Toutefois, ma motivation n'a jamais été l'espérance de gain par l'effet de levier. Mon calcul était simple: rendement brut entre 11% et 12%, Taux d'intérêts: entre 6,5% et 7%, endettement sécurisé à longue échéance, capacité d'autofinancement dégagée positive et assurée (assurance loyers impayés) ==> actifs décotés et sûrs.
Par contre, il est vrai, je n'avais pas du tout envisagé la bulle immobilière et heureusement que ces biens étaient "immobilisés!" sans quoi je les aurais vendus bien avant.
Le gain donc résulte des facteurs suivants:
-actifs décotés à importante capacité d'autofinacement, elle-même consolidée
-endettement sécurisé à très long terme
-absence d'activité de ma part
-chance: bulle immobilière sur les actifs concernés.

NB: Je considère qu'intrinsèquement est bon l'effet de levier résultant d'un endettement à très longue échéance et taux d'intérêts sécurisé. Est une autre question ce que l'on fait de cet argent? Bien entendu est inepte d'acheter avec levier bancaire un actif surcoté dégageant une capacité d'autofinancement insuffisante et non assurée ainsi que l'on fait et le font encore! tous les investisseurs en immbolier depuis disons 2001

Cordialement,
Graham

Valeur et Profit a dit…

Merci Graham pour ton témoignage sur ton acquisition immobilière.

Que penses-tu de l'effet de levier technique comme décrit dans l'article qui ne nécessite aucun endettement ?

Vos contributions sont les bienvenues.

CDLT,
Franck

Glob a dit…

Un sujet: le value trap?
Comme moi, vous etes aussi dans Idsud et ca pourrait être un gros piege a valeur dans le cas ou pas de privat avant 10 ans.
Explication du risque, comment les reconnaitre, savoir les eviter...

Anonyme a dit…

Je suis de plus en plus convaincu que cette idée est faussement pertinente hors période exceptionnelle comme l'an dernier. Pourquoi? Parce qu'en période normale, une décote sur fond propre est la plus part du temps justifiée par une rentabilité sur fonds propres médiocres. Ce qui signifie qu'à très long terme, malgré la décote, le rendement sera médiocre en achetant des titres justement dépréciés. Sauf coup de chance: la revalorisation intervient immédiatement après l'achat. Mais le plus souvent, en marché normal, il y a maintien de la décote. Une exception: les petites et très petites sociétés où il reste assez fréquent d'observer des anomalies passagères en raison d'un suivi faible par les analystes. En règle générale et temps normal, je crois que le marché est beaucoup plus efficient que l'on ne le consent. Les deux dernières années ne doivent pas servir de références, elles ont été totalement anormales.
Par contre, je pense bon de procéder à la manière de Buffett, c'est à dire en combinant les méthodes de Ben Graham et de Fischer. Ce qui revient à appliquer ta méthode mais sur des actifs de qualité. Le travail est moins évident car il y aura rarement décote sur fonds propres. Il s'agit d'acheter alors une société à la forte rentabilité sur capitaux propres mais avec seulement une légère prime: c'est donc appliquer ta méthode mais non sur les fonds propres ou d'autres éléments comptables trop simples mais sur la notion de "franchise économique" comme la conçoit Buffett. La rentabilité du placement à long terme est alors souvent légèrement supérieure à la rentabilité des capitaux propres. Mais, je l'avoue, c'est beaucoup plus difficile, moins sûr et sujet à erreurs et cautions.

Cordialement

Anonyme a dit…

Typiquement, IdSud me parait une fausse bonne idée. J'y avais réfléchi il y a quelques années.
L'espérance de gain dépend de la privatisation de la Française des Jeux. Celle-ci peut être retardée. En attendant, la FDJ risque de perdre de plus en plus de part de marché et donc risque de perdre en valeur. En attendant, les dirigeants d'IdSud se sucrent, traitent mal les minoritaires et gèrent assez médiocrement. La rentabilité d'IdSud depuis dix ans est mauvaise. Si la FDJ est privatisée dans 8 ans ou plus, IdSud restera un placement médiocre. Conséquence: c'est la chance qui fera le succès ou non d'un tel investissement.
Je faisais ce raisonnement il y a environ 4-5 ans sur ce titre. A mesure que les années passent, on peut toutefois se représenter que la probabilité d'une privatisation et donc d'une revalorisation d'IdSud se rapprochent et l'idée redeviendrait bonne. Pour l'instant, je préfère attendre et si j'investissais un jour ce ne serait qu'à très petite proportion.
Cordialement
Graham

Glob a dit…

Belle intervention Graham! Comme toujours, que ce soit sur bourso, securibourse ou ici.
Je suis entierement ok avec toi. Idsud est pour moi le parfait piege a valeur. Par contre je suis convaincu de l'aspect speculatif du dossier sur 2010. L'Etat a besoin de cash et le marche de l'IPO est de nouveau ouvert. De quoi faire monter la bete... En gros encore un pari avec un floor soutenu par de la valeur et un upside important. On verra!